Père saint, garde-les unis (Jn 17, 11b-19)

7ème dimanche de Pâques (B) Jn 17,11b-19

La prière de Jésus manifeste la pleine communion entre le Père et le Fils à la veille de la Passion (17,1-11a). Par cette prière, le Christ intercède pour que ses disciples demeurent unis, véritablement, jusque dans l’adversité.

Paul Gauguin, Christ au jardin, 1889

Père saint (17,11b-16)

Jn 17, 11b Père saint, garde-les unis dans ton nom, le nom que tu m’as donné, pour qu’ils soient un, comme nous-mêmes. 12 Quand j’étais avec eux, je les gardais unis dans ton nom, le nom que tu m’as donné. J’ai veillé sur eux, et aucun ne s’est perdu, sauf celui qui s’en va à sa perte de sorte que l’Écriture soit accomplie. 13 Et maintenant que je viens à toi, je parle ainsi, dans le monde, pour qu’ils aient en eux ma joie, et qu’ils en soient comblés. 14 Moi, je leur ai donné ta parole, et le monde les a pris en haine parce qu’ils n’appartiennent pas au monde, de même que moi je n’appartiens pas au monde. 15 Je ne prie pas pour que tu les retires du monde, mais pour que tu les gardes du Mauvais. 16 Ils n’appartiennent pas au monde, de même que moi, je n’appartiens pas au monde.

Garde-les unis

Jésus en appelle au lien qui l’unit au Père pour que ce dernier agisse en faveur de l’unité des disciples. La communauté n’est donc pas un agrégat de croyants mais l’œuvre de Dieu et de son Messie. Les verbes soulignent l’action même du Seigneur en faveur de cette communion : garde-les, je les gardais, j’ai veillé, je leur ai donné… La communauté est décrite comme le lieu où se déploient la sainteté du Père et la Parole du Fils. Le contexte proche de la Passion rejoint également celui de la communauté johannique souffrant de persécutions.

La fidélité du Christ envers le Père et son amour pour les siens, jusqu’au bout (13,1), appelle les disciples à la fidélité envers leur Seigneur. La mention de celui qui s’en va à sa perte n’évoque pas seulement la future trahison de Judas. Désignée de manière anonyme, cette figure dénonce également les défections qui blessent la communauté. Le thème insistant de l’unité à préserver suggère que celle-ci était déjà mise à mal au temps de l’évangéliste. L’accomplissement des Écritures vient alors éclairer ces désertions, non comme un échec ecclésial, mais il les inscrit dans le plan du salut. Le reste de la communauté témoigne ainsi de cette joie divine.

Mosaïque Nea Moni, XIe s.

Qu’ils aient en eux ma joie

La joie du Christ, promise à ses disciples, prend sa source dans la fidélité que le Père lui assure par la Glorification (17,1-11a). La joie exprime cette pleine reconnaissance divine. Face aux tentations d’abandon, au risque de succomber aux cris du monde hostile, les disciples sont, par cette joie du Christ, assurée d’être sanctifiés par leur persévérance. La prière devient un encouragement.

Si les disciples ne sont pas du monde, ou plus exactement en sont exclus, ils demeurent dans le champ bienfaisant de Dieu qui les garde du mauvais. Ce dernier terme n’est pas à entendre au sens moral, et ne désigne pas non plus le monde en tant que tel. Jésus intercède auprès du Père pour les garder de toute désespérance et de tout découragement qui les ferait quitter la communauté. La prière insistante de Jésus rappelle cet attachement du bon berger envers ses brebis (Jn 15), et l’action bénéfique de la vigne pour ses sarments (Jn 10). Face à la haine du monde, la communauté reçoit tout l’amour du Christ.

Mosaïque, Jésus en prière

Sanctifie-les (17, 17-19)

17, 17 Sanctifie-les dans la vérité : ta parole est vérité. 18 De même que tu m’as envoyé dans le monde, moi aussi, je les ai envoyés dans le monde. 19 Et pour eux je me sanctifie moi-même, afin qu’ils soient, eux aussi, sanctifiés dans la vérité.

Pour eux je me sanctifie

Adressée au Père saint, la prière de Jésus rend compte de la sanctification des disciples, fidèles à sa parole et unis les uns aux autres et à leur Seigneur. La sanctification permet ainsi de redéfinir leur exclusion du monde, non comme un acte ostracisant, mais comme une élection divine. Dans le langage biblique, le saint défini Dieu lui-même dans sa transcendance. La sanctification du croyant représente son adéquation à la volonté et aux commandements de Dieu. Dans cette prière, cette sanctification est pourtant ordonnée à d’autres lieux. Le premier est celui de l’écoute de la Parole qui n’est autre, en cet évangile, que le Verbe incarné, Jésus-Christ (Jn 1,14). Il est Celui qui révèle tout le dessein créateur et salvifique de Dieu.

Bien plus, sa sanctification est associée à son envoi dans le monde, par le Père, qu’il manifestera pleinement à la croix. La livraison de sa vie, par amour, devient une véritable offrande sanctifiante destinée à la communauté des disciples. Le Christ s’offre pour faire vivre sa communauté. L’existence de cette dernière n’est donc plus de l’ordre de la survie mais de la mission. Les disciples sont, par leur amour mutuel, leur unité et leur persévérant attachement au Christ, missionnés, envoyés dans le monde pour révéler l’amour du Père (17,23). C’est ce que développera la section suivante (17,20-26).

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François BESSONNET
François BESSONNET

Bibliste et prêtre (Vendée). → bio

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